le 14-06-2015
Le baccalauréat 2015 débute
mercredi prochain. Si la plupart des élèves révisent les cours jour après
jour de façon assidue, d’autres s’adonnent à des techniques moins
nobles mais bien connues : les antisèches.
Ils sont de
plus en plus nombreux à tricher, ou à plagier. Selon les
chiffres du ministère de l’Education nationale, le nombre de tentatives de
fraude au bac en 2014 a bondi de 9,8% en un an, a révélé
"Le Parisien" en mai dernier, et les copies falsifiées ont, elles,
augmenté de 5,3 points entre 2013 et 2014.
# L'art de la
triche old school
Les accessoires
A l’époque
où internet n’est qu’à ses balbutiements, et que la technologie n’est pas tout
à fait à la pointe, les lycéens trichent avec les moyens du bord. En l’occurrence, ceux qu’ils ont à disposition sur la table. La très
prisée règle en fer est un classique. Une technique simple qui nécessite un crayon à papier bien taillé et une
gomme. Discrète et efficace. L’inconvénient : trop connue du monde des
enseignants, ce subterfuge ne trompe plus personne.
La bouteille d’eau aussi a su faire ses
preuves. Le lycéen écrit les dates historiques ou ses formules mathématiques
sous l’étiquette, décollée au préalable, et recollée avec soin. Un petit coup
d’œil vers la bouteille orientée avec justesse, et l’élève comble ses lacunes
comme par magie.
La peau, tout simplement
Certains poussent même l’astuce jusqu’à s’écrire sur l’ongle, mais l’aide reste minimale.
L’antisèche papier, la plus classique
La plus célèbre, celle qui a sauvé
l’honneur de nombreux bacheliers : le morceau de papier. Dans la poche, la
trousse (interdite aujourd’hui), le creux de la main, cet aide-mémoire se
retrouve partout où il y a de la place. Les grandes dates de la guerre froide
sont enroulées autour de la cartouche d’encre du stylo plume. Les citations de philosophes sont scotchées aux
semelles des lycéens. Le tableau périodique des éléments peut
même se glisser dans un trou percé dans la gomme.
L’inconvénient principal de ces techniques : leur taille réduite. Les fraudeurs n’ont finalement que quelques centimètres pour retranscrire des morceaux de cours. Avec la technologie, le tricheur d’aujourd’hui a lui bien plus de moyens pour exprimer sa "créativité".
# L’antisèche 2.0
"L'antisèche n’a pas encore disparu. Elle est même considérée comme l’un des outils
les plus utilisés", constate Christophe Michaut. Au bac 2014, l’aide-mémoire papier représente presque 28% des pratiques
frauduleuses.
Si le
subterfuge est toujours bien ancré chez les tricheurs nouvelle génération, il a
évolué. "Aujourd’hui, les élèves prennent leurs cours sur des
ordinateurs", rappelle Christophe Michaut. Ils peuvent
ensuite les imprimer en miniatures, et les placer aux mêmes endroits que leurs
aînés.
Autre nouveauté : il est désormais
possible de remplacer l’étiquette des correcteurs, tubes de colles, ou même des
bouteilles d’eau. Grâce à des formulaires vierges trouvés sur des sites
spécialisés, une nouvelle étiquette peut remplacer l’originale. Seul un œil
averti se penchera sur la liste des composants du Tipp-Ex de l’élève afin d’y
trouver le cours de SVT miniaturisé.
La calculatrice
Technique très répandue parmi les lycéens,
le bidouillage de la calculatrice graphique. "Un quart des élèves a recours à cette
pratique", estime Christophe Michaut, qui a même établi une figure type du
tricheur à calculatrice.
C’est plutôt un bon
élève, qui maîtrise a minima le contenu de l’enseignement puisqu’il fait un
travail de sélection au préalable."
Une technique qui n’est pas illégale,
grâce au flou juridique de la circulaire 99-186 de 1999.
La calculatrice est autorisée lors de certaines épreuves, et l’ajout de données
à l’appareil n’est pas explicitement interdit. Comme rien n’arrête le
progrès, "certains logiciels permettent désormais de transférer
directement le cours entier, voire des photos, depuis l’ordinateur jusqu’à la
calculatrice", constate Christophe Michaut.
Malheureusement pour les élèves paresseux,
les calculettes programmables seront interdites à partir de 2018,
indique une note de l’Education nationale. Les élèves devront se contenter
d’une calculatrice de collège, ou se procurer un modèle équipé d’un "mode
examen".
Les objets connectés
Mais évidemment, aujourd'hui, sur la
première marche du podium des pratiques frauduleuses, on retrouve : le
smartphone (30% des cas). Les élèves sont censés éteindre l’appareil et le
ranger dans le sac avant chaque examen. Mais certains le laissent
"malencontreusement" allumé dans leur poche. Ils peuvent ensuite
accéder à internet, ou à leur bibliothèque de photos (de cours), ou encore aux
réseaux sociaux.
Une enquête a déjà été ouverte début juin
par le parquet d’Alger, pour cas de fraude via Facebook. Un quart d’heure après
le début d’une épreuve du baccalauréat algérien,
des candidats ont mis en ligne les sujets via leur téléphone pour demander de
l’aide.
Les smartphones ont pris une telle
proportion que, depuis 2013, toutes les académies sont équipées de détecteurs
de téléphones portables. Les recteurs les répartissent de façon aléatoire dans
différents centres d’examen.
Les montres connectées aussi ont un avenir
dans les pratiques des tricheurs. Un Suisse en a fait les frais début mai. En
plein examen, l’examinateur a remarqué que l’élève travaillait plus avec sa
montre qu’avec son stylo. Il écopé d’une note de 1 à son test.
L'oreillette Bluetooth
Dernière méthode en date et qui pourrait
bien s’étendre : le coup de fil presque invisible. Une candidate au bac en
Algérie a été surprise avec unepuce électronique dans l’oreille,
rapporte "Metronews". A l’aide de ce moyen de communication
satellitaire, elle se faisait dicter les réponses par un correspondant.
Plus simples
et plus répandues : les oreillettes Bluetooth, reliées à un i-Pod caché dans la
poche et dans lequel l’enregistrement des cours a été intégré. Les cheveux
longs sont recommandés.
Bien
entendu, qu’elle soit classique ou high tech, la triche au bac est condamnée.
Les sanctions sont lourdes et vont du blâme à la prison, en passant par
l'interdiction de repasser le bac avant deux ans (voire cinq). Dans les cas les
plus graves, comme une fuite de sujets ou une substitution d'identité, le
tricheur risque trois ans d’emprisonnement et/ou 9.000 euros d’amende.
Juliette Pousson